Covid-19 au Kenya : le paiement mobile accélère

Les Kényans ont payé 528,9 milliards de shillings, soit environ 4,9 milliards de dollars avec leurs téléphones portables en octobre, l'usage des paiements mobiles ayant considérablement augmenté pendant la pandémie de Covid-19, selon les nouvelles données publiées lundi par la Banque centrale du Kenya. Ce montant est le plus élevé jamais enregistré dans ce pays d'Afrique de l'Est depuis que les paiements mobiles ont été introduits en 2007 et correspond à une moyenne de 163 millions de dollars par jour. Cette hausse est également due aux diverses mesures mises en place par le gouvernement pour lutter contre le Covid-19.

Ces mesures incluent la suppression des frais sur les transactions d'un montant égal ou inférieur à 9,17 dollars pour réduire l'utilisation de l'argent liquide, ainsi que le dépôt gratuit d'argent d'un compte mobile vers un compte bancaire. Le gouvernement a aussi relevé le volume des transactions quotidiennes de 1 376 dollars à 2 752 dollars.

Selon la Banque centrale du Kenya, ces dispositions ont augmenté le volume et la valeur des transactions depuis leur introduction à la mi-mars. Elles ont aidé des milliers de consommateurs à adopter le paiement mobile, ce qu'ils n'avaient pas fait auparavant en raison des frais de transaction élevés. De nombreux Kényans se sont également mis au commerce en ligne et au paiement de leurs factures sur leur téléphone. Après le début du confinement partiel du Kenya en mars, un million de nouveaux utilisateurs ont rejoint M-Pesa, portant le nombre d'abonnés à 25 millions, soit environ les trois quarts des Kényans de plus de 15 ans.

En effet, si dans les pays développés, les paiements sans contact ont connu une envolée, difficile d'imaginer le même scénario sur le continent africain où l'inclusion bancaire n'est pas encore effective. Concrètement, les économies africaines reposent encore beaucoup sur les liquidités. En même temps, les infrastructures comprenant les guichets ou encore des distributeurs ou machines n'existent pas partout, d'où le succès du porte-monnaie électronique.

Dans le cadre de cette initiative, d'autres sociétés de services de paiements financiers et des banques commerciales ont également supprimé les frais pour les clients qui transfèrent de l'argent entre leur portefeuille mobile et leurs comptes bancaires.

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La pandémie comme accélérateur

Le paiement d'argent mobile en Afrique de l'Est fait partie intégrante du quotidien des populations. Créé il y a une dizaine d'années par les opérateurs de téléphonie mobile, le porte-monnaie électronique permet aux détenteurs d'un téléphone de stocker de l'argent. Ils peuvent l'utiliser pour retirer de l'argent, payer leurs factures, recevoir leur salaire, régler leurs courses en magasin ou envoyer de l'argent à leurs proches. Cela représente un vrai service en Afrique, où moins de 20 % de la population est bancarisée. D'où son succès.

Au-delà, le paiement mobile a également constitué une alternative pour les gouvernements et les organisations non gouvernementales, pour rapidement venir en aide aux communautés les plus vulnérables qui ont été les plus durement touchées par les effets socio-économiques de la pandémie. Exemple au Kenya avec l'organisation Mutual Aid Kenya, dirigée par de jeunes militants communautaires. Plus besoin d'attendre les espèces, ils peuvent directement collecter les dons.

L'État s'est naturellement tourné vers ces services pour verser l'aide directement aux entreprises et aux particuliers. Aujourd'hui, le besoin des gouvernements de trouver un moyen rapide et sûr d'envoyer des fonds pendant la pandémie souligne le rôle de plus en plus systémique du service.

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Prochaine étape

Pourtant, l'opérateur de télécommunications Safaricom, qui domine les paiements mobiles avec sa plateforme M-Pesa, aux côtés de Airtel et Telkom du groupe Vodafone – a prédit une baisse de 7 % de son chiffre d'affaires annuel. « La pandémie de Covid-19 représente une opportunité pour Safaricom de tirer parti de ses capacités numériques et de données pour soutenir les clients et la communauté pendant cette période difficile et tout au long du processus de récupération. Nous nous concentrerons sur le développement d'une gamme de produits et services numériques qui apporteront des solutions durables aux défis dans des secteurs tels que l'agriculture, la santé, l'éducation et les services essentiels », a récemment déclaré à la presse Peter Ndegwa, le PDG de Safaricom.

« Ces changements, déclenchés par Covid-19, ont permis l'accélération et la mise à l'échelle des économies sans numéraire et numérique », a souligné à nos confrères de Bloomberg Serigne Dioum, responsable des services financiers mobiles chez MTN Group.

La crise a également accéléré la phase suivante du développement de M-Pesa. Le géant du porte-monnaie électronique veut accélérer les services financiers pour les petites et moyennes entreprises du Kenya. L'objectif est de générer des marges plus élevées. « En termes d'emploi, le secteur des petites entreprises est la bouée de sauvetage de ce pays », a poursuivi Peter Ndegwa.

L'Afrique subsaharienne compte plus de comptes d'argent mobile que partout ailleurs dans le monde, avec environ 396 millions à la fin de 2018, soit 46 % de tous les clients, selon la GSMA, le groupe mondial de l'industrie des opérateurs mobiles. « Cette pandémie a été un moment déterminant pour les fournisseurs d'argent mobile », a déclaré à Bloomberg Akinwale Goodluck, responsable de l'Afrique subsaharienne pour la GSMA.

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